La moto électrique ne fait pas encore vibrer les motards. Et pourtant, le futur de la mobilité ne nous condamne pas à vivre dans un monde sans folie et dénué de passion. C’est en tout cas l’idée de Zero Motorcycles, qui veut faire des motos, des vraies. Mais les Californiens vont-ils devenir le Tesla de la moto ?
Ce qu’il faut retenir :
- Moto électrique accessible permis A1 et A2
- Vmax : 132 km/h – 106 Nm de couple
- Batteries lithium-ion de 7,2 kWh- 100 km d’autonomie environ (testé)
- Tarif : à partir de 15 315 €
- Pour qui ? Urbains branchés
Équipements du pilote (1m82 / 80 kg) :
- Casque : Nishua Enduro Carbon
- Blouson : Spidi Metromover
- Chaussures : Vans SK8-HI MTE II
Comme beaucoup d’entre nous, mon premier frisson procuré par une moto, c’était le grondement d’un moteur. D’ailleurs, comme beaucoup d’enfants, si l’on me demande de décrire une moto, je vais d’abord faire un bruit de vroum vroum, broaap, brrr. C’est normal, la relation à l’engin est sensorielle, passe par l’ouïe, le toucher avec les vibrations, l’odorat pour certains. Alors, monter sur une moto électrique, qui vous prive de vos sens, c’est comme devenir sourd d’un coup, il manque un truc !
« Julien, on sait que tu es un kéké de sudiste bourré de préjugé ! Tu vas voir notre supermotard, il dépote ! », me lâche Bill, à l’autre bout du téléphone, pour me convaincre d’essayer la Zero FXE. Et comme mon devoir de journaliste est de découvrir et de ne pas rester sur mes aprioris, me voilà embarqué pour un essai d’Américaine à piles : la Zero FXE.
Pour que la suite soit agréable pour vous, je vais éliminer ici les mauvais jeux de mots : Moto coup de foudre ? L’amour à rallonge ? citadine branchée ? Pile sur roues ? Pile électrique ! Lapin Duracell ? Moto nucléaire ? Moto à charbon ? Moto à Watts ! Batterie à roulettes ? Aspirateur à roulettes ? Aspirateur Dyson à roulettes ? …
Je pense que l’on peut démarrer sereinement cet essai maintenant.
Test Zero FXE : Duck face !

D’habitude, je passe brièvement sur l’esthétique d’une moto, car j’estime que c’est subjectif. Mais cette fois, je trouve que la FXE est réussie ! Comment ça, vous n’êtes pas d’accord ?
D’abord, il faut saluer sa belle ligne épurée, où l’on sent l’influence minimaliste d’Apple, qui permet d’éviter des formes pseudo-futuristes et torturées qui cherchent à prouver que l’électrique, c’est l’avenir. Ça transpire plutôt la nostalgie, celle de mon premier supermotard d’ado. Son phare rond et sa grosse pelle à tarte, donne à cette gueule de canard un look très rétro qui sent bon les années d’avant. On a presque envie de faire du cross bitume avec.
Dans son ensemble, la petite Zero a un bon niveau de finition et une vraie qualité d’assemblage. On appréciera le petit badge « crafted in California » pour nous signaler que c’est une vraie Américaine et pas une Asiatique simplement dessinée en Californie façon Apple (encore eux). D’ailleurs, la finesse des soudures sur le cadre nous rappellent que l’ouvrier américain est un poète. Mais au moins, c’est solide ! Le « réservoir », il va falloir que l’on travaille à trouver des nouveaux noms pour désigner les choses sur les électriques, est en plastique imitation alu, c’est plutôt réussi et ça fait cossu. Le minimalisme permet d’avoir l’essentiel avec un guidon, un écran TFT et presque rien d’autres. L’essence de la moto, non ? Ok, mauvais jeu de mots, c’était le dernier.
Côté ergonomie, la Zero FXE n’est pas une planche à pain, puisque la selle propose un vrai moelleux. Certainement la culture américaine du sofa. De toute façon, vous ne ferait pas Paris-Nice avec, soyons honnête, vous n’aurez donc pas le temps de souffrir. Une fois installé, derrière le grand guidon, l’ergonomie est naturelle, très droite, c’est confortable, mais on a tendance à reculer sur la selle pour se sentir moins collé au guidon.
Cette Zero FXE est haut perché, avec une selle qui culmine à 835 mm de hauteur, mais la moto est fine et une fois dessus, on pose facilement le pied au sol, quelle que soit sa taille. Y compris @Whamdi.b qui s’est occupé des photos et qui mesure 1m70 environ. Il faut juste travailler sa souplesse pour lever la jambe quand vous monterez dessus.
Un truc de Geek ?

Les comodos vont, eux aussi, à l’essentiel : pas de molette ou de joystick pour naviguer dans les menus, il faut appuyer sur des boutons directement sur la dalle TFT. Tellement 2013 ! L’écran TFT est clair, lisible, ne balance pas des effets spéciaux façon Avengers pour vous donner la sensation de conduire le futur, mais vous donne toutes les informations utiles, dont le temps de charge prévu, et votre autonomie réelle restante. Il n’y a pas de navigation ou de musique que l’on commande vocalement avec l’intercom. Comparé à une BMW GS, une Ducati Multistrada V4 ou une Honda Africa Twin, ça fait un peu cheap. Mais au moins, pas besoin de passer un diplôme d’ingénieur pour naviguer dans les menus et régler son horloge.
Zero a tout misé sur votre flemme et votre addiction à votre smartphone. Comme un bon Californien branché et connecté, vous l’avez toujours dans la main, autant l’utiliser pour votre moto aussi. Et finalement, c’est une mauvaise idée, car l’application est agréable à utiliser. L’appairage se fait facilement et rapidement via le Bluetooth. Vous pourrez consulter toutes les informations du TFT, votre consommation d’énergie et vos émissions de CO2, etc. Votre téléphone peut même se transformer en deuxième écran pour en afficher davantage, il va donc falloir acheter un support de téléphone.
Ce qui est intéressant, c’est le mode de conduite « custom » qui vous permet de personnaliser le comportement de votre moto. Vous pourrez ainsi paramétrer la vitesse maximale, le niveau de couple délivré, pour éviter de finir dans le mur à chaque accélération, mais aussi, la régénération au freinage et à la décélération.
Finalement, il ne manque que la navigation intégrée.
Level Zero, level easy ?

Oui, ma première impression, c’était d’être sur une trottinette électrique. L’absence d’ambiance sonore y est pour beaucoup. C’est surtout que sans embrayage, la vie est plus facile et sans bruit et autres vibrations, elle est moins stressante. Quand on débute, ce n’est pas à négliger.
Une moto qui ne pèse que 135 kg (tous pleins faits haha !), c’est déjà un gage de facilité. Sur son terrain de chasse qu’est la ville, la Zero est redoutable. On ressent tout de suite le bon équilibre de la moto et on oublie cette histoire de batteries qui plombent les motos en les rendant trop lourdes. Elles sont situées de telle manière qu’elles participent à la stabilité générale de la moto en abaissant le centre de gravité. Parfait pour slalomer à basse vitesse. À un détail près.
Sans embrayage, il faut trouver son équilibre différemment. C’est assez surprenant pour gérer la moto, d’autant que la poignée d’accélération est un peu chatouilleuse, mais ça on y reviendra. Ne soyez donc pas surpris, si vous posez souvent le pied au sol.
Mais sa vraie qualité se cache ailleurs : la FXE représente la maturité du constructeur californien, avec une moto aboutie au comportement dynamique digne de ce nom. En vraie supermot’, elle est hyper réactive, on se retrouve vite à attaquer et à guetter les « pif paf » ou à enchainer les ronds-points. Le train avant est précis et offre une sensation de légèreté. La suspension Showa propose un débattement important, de 178 mm à l’avant et 227 mm, mais cela ne vient pas perturber le comportement de la moto. Elles apportent du confort sur les dos d’ânes et les pavés, sans pour autant que la moto ne se tortille au virage suivant. La FXE est une moto saine et facile à prendre en mains.
Oui, la Zero FXE, c’est une électrique qui ne sert pas qu’à envoyer des watts en ligne droite. Oh! Le feu rouge est déjà ! Le simple disque avant fait bien son boulot, les étriers J.Juan sont performants, mais le freinage n’est pas flamboyant et on se dit que l’on aurait aimé avoir des équipements à la hauteur du prix d’achat, comme du Brembo par exemple. Sauf qu’avec le système de régénération, ce n’est pas très utile. La moto freine toute seule ou presque et il faut adapter sa manière de freiner en utilisant la décélération, l’ensemble est tout de suite bien plus cohérent et efficace. En plus, on économise des plaquettes de freins.
Puissance électrique, level hard !

Le gros argument de vente d’une électrique, c’est la puissance du moteur. Avec la Zéro FXE, c’est encore pire, voire trop !
Pourquoi ? Parce que le moteur ZF 7.2 offre 106 Nm de couple, direct dans la courroie et la roue arrière. Et je parle aussi pour la version 11kW, équivalente 125. C’est-à-dire qu’avec un simple permis A1, vous vous retrouvez avec autant de couple qu’une grosse cylindrée, disons une Honda CB 1000 R. Et comme les Américains adorent manger des Spicy Wings, ils n’ont mis aucun anti-patinage pour vous aider en cas d’excès d’optimisme, Ajoutez à cela des Pirelli Diablo Rosso II qui sont performants sur le sec, mais se comportent comme des Gremlins dès qu’ils touchent l’eau. Après tout, il ne pleut plus en Californie depuis quelques années…
Heureusement, la réponse à la poignée est d’une précision redoutable et se dose au millimètre. Votre « traction control », c’est donc votre poignet. Comme sur une moto à l’ancienne, les puristes apprécieront.
À l’accélération, en mode sport, la FXE a suffisamment de patate pour improviser n’importe quelle drag race sur Hollywood Boulevard, ou Haussman Boulevard. Et avec une Vmax à 132 km/h, vous pourrez donc prendre l’autoroute en toute sécurité, même en permis A1.
La différence de performances entre version A2 et version 11kW est… inexistante ? La fiche technique annonce la puissance continue à 15 ch 37 00 tr/min pour la 11 kW et 20 ch à 4 300 tr/min pour la version A2. Mais la puissance en crête, la plus importante pour une moto électrique, est la même à 44 ch et avec le couple monstrueux pour les deux. Un tour de passe-passe rendu possible par la technologie des moteurs américains qui s’amusent beaucoup lorsqu’ils passent sur des bancs prévus pour de vulgaires thermiques. « Loosers » certains techniciens auraient entendu dans le silence des 30 minutes du test de puissance.
La Zero FXE représente certainement le meilleur rapport poids/couple du marché, on restera donc très prudent lors de la première prise en main. Et je dois reconnaitre, que je n’ai pas beaucoup mis le mode sport pendant l’essai. Ayant assez de watt à disposition en mode eco, et préférant profiter de la régénération d’énergie plutôt que de vider mes batteries pour me téléporter au feu rouge suivant.
Zero, think different

Les plus matures se souviendront de ce slogan Apple. Mais l’analogie n’ira pas plus loin. Quoique …
Les notions moto électrique et plaisir ont encore du mal à cohabiter ensemble, mais sur la FXE, on s’amuse vraiment, et ça ne tient pas qu’au couple dément qui donne une envie irrépressible de torturer les Pirelli Diablo Rosso II et de les faire partir en fumée rapidement, pour mettre la génération IV.
Les sensations sont complètement différentes du thermique. Sans bruit de moteur, sans les vibrations, il faut réapprendre à apprécier la moto. On se retrouve au contact de la route, sans filtres. Vous entendez la moto travailler à chacune de vos actions, vous découvrez le son des plaquettes de freins, de la courroie, vous vous concentrez sur le travail des suspensions et finalement, plus rien ne vous échappe. Sans moteur pour occuper le devant de la scène, le châssis se retrouve au centre de l’attention et vous serez bien moins tolérant à la médiocrité. Comme si vous mangiez un burger avec des frites, mais sans Ketchup.
Mieux, votre pilotage n’est plus obsédé par les grosses accélérations rugissantes, mais par l’envie de placer la moto, de trouver la bonne trajectoire, et de bondir sur chaque virage. « Moi, elle me donne plutôt envie de conduire zen, cette moto », me contredit Hamdi qui a essayé l’engin. Étrange personnage raisonnable, puisque moi, j’ai fini par perdre tout sens de la vitesse dans ce silence assourdissant.
Là où la FX/E est vraiment frustrante, c’est qu’elle est suffisamment performante pour s’émanciper de la ville. Mais avec son autonomie qui avoisine les 100 km, elle est condamnée à ne jamais dépasser la banlieue. Même un tour sur autoroute, qui se fera sans souci, ne vous emmènera pas plus loin que 60 km avant de vous demander de charger. Et la petite balade du samedi aprèm autour de la maison, se transformera en weekend découverte, à errer dans les saloons pour s’envoyer des Ribs en attendant que la moto soit chargée
La régénération d’énergie, même à son maximum, ne servira qu’à gagner quelques kilomètres d’autonomie et les 160 km semblent inatteignables. Ce sera suffisant pour le quotidien urbain, puisque la moyenne nationale du “comuter” est de 45km par jour. Vous pourrez donc attendre le soir pour vous brancher sur une simple prise 220 V (prise domestique), pour la laisser charger complétement en quelques heures… Bon ok, en 9 h si la batterie de la Zero est à zero.
Zero FXE : insert coin

Le capitalisme américain est au sommet de sa forme chez Zero ! Et pour devenir un vrai Californien en FXE, il faudra raquer comme un Californien : 15 315 euros
Ce tarif explique certainement les faibles ventes et les critiques à son égard. Le minimalisme entraine une sorte de frustration, surtout en comparaison de ce que propose la concurrence thermique, avec des produits de niveau Premium. Mais mettre un shifter sur une électrique semble compliqué pour se démarquer.
D’autant qu’il faudra rajouter encore quelques crédits pour bénéficier du chargeur rapide à 828 euros. Et que pour gagner des points de vie, on voudra aussi changer la monte d’origine pour mettre des Pirelli Scorpion Street, ou des excellents Continental RoadAttack 4 plus polyvalents, surtout sous la pluie.
Sauf que vous êtes prévenus, vous n’achetez pas une équivalente 125 cm3 thermique, mais une vraie moto avec votre petit permis A1. Malgré tout le prix reste élevé et il faut jouer de la calculette pour y trouver son compte. D’abord en additionnant les différentes aides à la conversion et autres bonus ecolo. Ensuite, en prenant en compte le prix du kWh consommé face au prix de l’essence, les entretiens simplifiés, l’usure des pièces qui se limitent aux plaquettes de frein et à la courroie. Ou encore, le prix du stationnement pour les Parisiens (ne faites pas les malins les autres, vous allez y passer) et l’accès aux ZFE bientôt limité aux véhicules zero émissions.
Avec un coût à l’usage bien inférieur à une moto thermique, un achat en LOA, prêt longue durée ou équivalent, semble être la solution la plus pertinente.

Conclusion : No FX ?
Cette Zero FXE est attachante ! Elle est parvenue à séduire le « motard » en moi, en lui proposant une moto joueuse, saine et avec un petit caractère que l’on ne soupçonnerait pas derrière le silence.
Avec ses performances moteur, c’est certainement l’un des meilleurs, voir LE meilleur rapport poids/couple du marché, et il ne faut donc pas considérer la FXE comme une équivalente 125 cm³.
Elle n’est pas pratique, normal pour une moto, mais s’avère confortable et je pourrais l’intégrer sans hésiter dans mon quotidien, en second véhicule. Mais voilà, son autonomie limitée associée à un prix élevé viennent refroidir mes ardeurs et m’empêcher de renouer avec l’ado roulant en supermotard que j’étais, les cheveux peroxydés en moins.
La FXE possède un double visage : la douceur de la vie sans bruit et sans vibrations. Et la violence des 106 Nm de couple, balancés sans autre filtre que votre capacité à doser l’accélérateur.
On l’aime, on la déteste, elle est attachante et agaçante, bref, la Zero est une vraie moto à l’Américaine, et parvient à rivaliser avec les thermiques, entre 2 recharges.
Elle démontre que la marque Zero a progressé depuis 2006 et s’impose désormais comme un vrai constructeur moto. Mais si le produit est de qualité, les Californiens sont encore trop gourmands pour les Européens avec ces tarifs, surtout en ne parvenant pas encore à se démarquer vraiment. D’ailleurs, c’est son plus gros défaut : une image de marque encore trop faible par chez nous. BMW arrive bien à vendre le CE 04 en masse !
On aime
- Look
- Qualités dynamiques
- Ça envoie des watts !
On aime moins
- Les pneus d’origines d’ancienne génération
- L’autonomie limitée
- Le prix
Et en face, la concurrence ?
La Zero FXE est un peu seule dans sa catégorie. Difficile de la comparer aux équivalents 125, façon Super Soco, tellement ses performances écrasent la concurrence dans cette catégorie. Et des motos électriques pour A2, ça ne court pas encore les rues, ou ce n’est pas encore suffisamment sérieux pour être pris en considération. Sauf peut-être un 2-roues aux performances étrangement proches…
BMW CE 04

Le scooter de BMW représente le 2-roues électrique le plus abouti actuellement. Prix élitiste, autonomie limitée à 100 km, et pourtant le scooter allemand échappé d’un film de SF a rencontré un vrai succès. Certainement le badge BMW qui rassure plus que l’exotisme du cowboy surfer californien.
Retrouvez l’essai complet du scooter BMW CE 04 sur A2 Riders
Tarif : à partir de 13 215 euros
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Je ne dirais pas que ça nous prive de nos sens (enfin, je suppose; je n’ai jamais conduit de meule électrique) : si le moteur fait moins de bruit, on entend mieux tout ce qu’il y a autour, non ?
Article top. J’ai la version A2 et je me régale tous les jours.
Je confirme qu’il faut changer les pneu Pirelli le plus vite possible (j’ai mis des Michelin Road 6 et ca change tout sous la pluie). Faut savoir aussi que par temps froid la batterie délivre moins de puissance donc le même test en juin t’aurait plus impressionné ^_^ .