Quand on pense à KTM, on pense trails puissants, sportifs et énervés. Mais dans la gamme, il existe un petit monocylindre qui prend tout le monde à contre-pied : la KTM 390 ADV. La petite Duke version trail A2, incarne la philosophie du « light is right » mais est-ce suffisant pour l’aventure au long cours ?
Cette KTM 390 ADV, j’ai eu le temps de la savourer. 2 700 kilomètres entre l’Afrique du Sud, le Lesotho et le Swaziland, c’est ce qu’on appelle un essai en conditions réelles. Le petit trail autrichien s’imagine comme une vraie baroudeuse pour permis A2 en mal d’aventure. Cela tombait bien, j’étais en mal d’aventure et il me fallait trouver un destrier A2, prêt à manger de la borne, que ce soit sur tarmac, sur les pistes en latérites ou les pistes défoncées.
Je ne vais pas vous refaire le voyage puisque vous pouvez relire à l’envie, la mini-série de cette aventure en Afrique australe. 8 épisodes comme si vous étiez derrière le guidon, sur les routes du bout du monde.
Alors, nous allons nous concentrer sur la moto. Un papier pragmatique sur A2Riders, oui messieurs dames !
KTM 390 ADV, le retour du monocylindre

Depuis que les BMW 1250 GS dominent le marché, les trails sont partis loin, très loin de la réalité. Surpuissants, trop grand, trop lourds, trop chers. Ils me donnent l’impression que si tu ne pars par avec un tank en voyage, tu n’iras nulle part. C’est faux.
La Yamaha Ténéré 700 l’a prouvé, on peut se contenter de l’essentiel et revenir à un esprit du trail qui aime les choses simples. KTM est allé plus loin, en étant parmi les premiers constructeurs à remettre au gout du jour les trails avec monocylindre de moins de 500 cm³.
Le monocylindre, c’est une autre expérience de la moto, une saveur oubliée qui nous ramène aux années 80 et 90. Un mono n’est pas aussi simple à appréhender qu’un bicylindre. C’est souple à bas régime, ça monte tranquillement dans les tours avant de s’exprimer à mi-régime puis d’oublier le reste. Mais le mono patte a évolué. Fini le moteur pointu et casse bonbons. Sur la KTM, c’est une réinterprétation moderne et ça se sent.
Au niveau du comportement, les Autrichiens ont travaillé à le rendre plus élastique. Pas trop creux en bas des régimes, il permet de rouler en souplesse, sans jouer sur la boite en permanence pour trouver de la reprise.
Il peut reprendre sur un filet de gaz sans cogner, et propose toujours un peu de puissance disponible. Avec, 37 Nm de couple sur une moto de 172 kg, il y a de quoi pousser pour dépasser des gros camions sur des grandes lignes droites de la banlieue très urbanisée de Johannesburg ! C’est plutôt rassurant, surtout pour moi qui avais peur d’être vite trop limité avec mes 44 ch de puissance pour survivre dans cet environnement.
Les vibrations sont limitées, c’est même confortable et doux à rouler. Passé les 6 000 tr/min, le mono cylindre s’énerve et pousse avec vigueur. Le moteur est volontaire et joueur, on se retrouve vite à 130 km/h, on dépasse les 7 000 tr/min mais il reste de la marge avant d’atteindre les 9000 tr/min de la zone rouge.
Alors oui, il faut accepter de rouler un peu plus doucement qu’à l’attaque avec une 1290 Super Adventure. Il faut accepter que 150 km/h, c’est déjà le bout du monde et que vous ne rattraperez pas votre retard en mettant gaz. De toute façon, les limitations strictes de vitesses sont censées vous empêcher de faire cela.
Ce petit monocylindre a toujours un peu à donner, il est facile à gérer et même plutôt joueur. On dose la poignée de gaz avec précision, on gère ses régimes moteurs, la boite de vitesse ne vous fait jamais défaut, précise et rapide quand on force le rythme. La KTM 390 parvient l’exercice délicat d’éviter la frustration d’avoir une petite cylindrée et de proposer un caractère sportif, à son échelle, qui correspond à l’ADN KTM. Ce que ne parvient pas à faire la concurrence actuelle.
Et surtout, ce petit monocylindre possède une grande qualité : une faible consommation d’essence. 3,5L/100 de moyenne en ne ménageant pas sa monture. Avec le réservoir de 14,5 L, il y a de quoi flirter avec les 400 km d’autonomie et donc d’économiser des sous pour un bon diner le soir.
La 390 ADV est un trail à taille humaine

Le principal point fort de cette KTM 390 ADV, c’est son gabarit. Une petite moto légère de 172 kg avec les pleins, compacte avec un empattement de 1430 mm, pas besoin d’avoir le permis poids lourd pour la piloter.
On se sent à l’aise dessus que l’on soit grand ou moins grand. Ni la sensation d’être un crapaud plié en quatre, ni l’impression de rouler sur un pocket bike. Quand on est dessus, la petite KTM est valorisante vue de l’intérieur comme de l’extérieur. Et ce ne sont pas les gars de Durban croisés avec des KTM 980 et 1290 qui nous ont dit le contraire, nous complimentant même sur notre choix.
Dessus, même avec un sac de voyage jeté sur l’arrière, on se sent à l’aise, avec de la place sur la selle pour s’avancer ou reculer. Par contre, il faut oublier le duo, sauf pour dépanner. Même après une longue journée passée en selle pendant 600 km, je n’ai pas fini avec les genoux en miettes. Par contre, le postérieur fatigue vite sur la selle qui est plutôt dure. Cette dernière est d’ailleurs assez haute, à 855 mm de hauteur et les tailles modestes devront vérifier si elles touchent bien le sol. Surtout si vous prenez une selle « confort » qui est encore plus haute et ressemble à une selle enduro, ne me permettant de poser qu’un seul pied à la fois au sol.
Si l’ergonomie générale est bonne, héritée de la version routière de la Duke 390, quand on se met debout, cela se complique, surtout si vous dépassez le mètre 80 comme moi. Le guidon est large, mais il est loin ! La position n’est pas aisée à tenir, on se retrouve trop penché en avant. Les jambes ne parviennent pas à serrer le réservoir qui est trop bas, et les repose-pieds n’aident pas. KTM propose un kit pour rehausser le guidon et replacer les repose-pieds, mais c’est une option.
Enfin, la protection au vent est limitée, même si vous n’attendrez pas des vitesses astronomiques, La petite bulle est étonnamment efficace et envoie l’air assez haut pour protéger le buste. Le réservoir est assez protecteur lui aussi, ne laissant que le bas des jambes vraiment exposées.
De manière générale, vous n’êtes pas installé dans un confortable canapé, caché derrière un pare-brise. Vous êtes sur une moto, avec le vent dans la gueule, c’est ça aussi l’esprit original du trail !
ADN Duke dans un trail polyvalent

Oui, c’est une Duke 390 revisitée. C’est à dire une routière que KTM a modifiée pour en faire un trail tourné vers le off-road. Avec son cadre treillis tubulaire, c’est une bonne base pour travailler. Mais vouloir tout faire, n’est-ce pas risquer de tout faire mal ?
Sur la route, la 390 ADV est surprenante. On retrouve les qualités de la Duke avec une moto efficace, un châssis rigide et facile à emmener. La moto est amusante et on se retrouve à attaquer en toute confiance, à mettre de l’angle sans se faire peur.
La moto est rassurante, intuitive et il faut y aller fort pour trouver les limites. Si la fourche avant plonge trop, vous pouvez jouer sur les réglages pour la durcir afin d’adopter un comportement plus routier. Les molettes permettent de le faire rapidement et sans outil. Même sans cela, la suspension n’est pas molle et la fourche est rigoureuse. Le petit trail est incisif du train avant quand on roule à allure soutenue, et propose un bon feeling.
Une vraie petite routière, bien aidé par son petit gabarit et son petit poids, pas besoin de forcer sur ses talents d’apprenti pilote pour se sentir à l’aise. La roue avant de 19 pouces, semble être le bon compromis et offre suffisamment de polyvalence. Les freins Bybre sont bien proportionnés, précis et l’ABS qui fonctionne sur l’angle vous sauverez de vos excès d’optimisme.
En ville, sa maniabilité, son poids limité et son petit gabarit vous permettrons de survivre à l’aventure du quotidien, celle qui vous emmène chaque jour au boulot. Une moto douce à vivre, et facile à prendre en mains.
La 390 mérite-t-elle son badge ADV en tout-terrain ?

La KTM 390 ADV n’est pas une aventurière en carton qui aurait enfilé un pantalon kaki à poches pour faire semblant. Non, c’est une vraie, une dure.
Avec ses 170 mm de débattement ce n’est pas une grande sauterelle. Mais c’est suffisant pour manger les terrains défoncés. Sur les routes du Sani Pass, la suspension a tout absorbé, apportant un peu de sérénité dans une situation difficile pour le pilote. Et je n’avais pas pensé à jouer sur mes réglages de fourche.
Mais la garde au sol limitée, avec un sabot moteur en plastique qui traine à 200 mm de hauteur, va provoquer de nombreux frottements. Il faudra être malin dans le choix de sa trace. Oui, réfléchir et lire la piste plutôt que de passer en force comme avec un gros trail.
De manière générale, que ce soit sur la piste caillouteuse du Lesotho ou sur les grandes pistes en latérite du Swaziland, la petite KTM était une moto facile à emmener avec sa roue de 19 pouces à l’avant. Le petit trail se fait oublier et permet de se concentrer sur son pilotage sans avoir à compenser le poids de la moto.
Vous allez me poser la question des jantes à bâton ? Elles vont encaisser les chocs ! En alu forgées, elles se révèlent suffisamment solides pour une moto de ce gabarit.
C’est une excellente moto pour débuter en off-road donc. D’autant que la puissance limitée mais le couple suffisant permet de gérer les gaz sans se faire peur, tout en mettant suffisamment de « watt » pour avancer. Pour moi qui ne suis pas encore un pro du off-road, j’étais très heureux d’ailleurs d’avoir fait le Sani Pass avec cette moto plutôt qu’une autre. Les plus expérimentés seront surpris par ce qu’ils arrivent à en tirer et à lui mettre dans la gueule.
En dehors de la garde au sol, son plus gros défaut, c’est l’ergonomie debout, mais ça on en a parlé un peu plus haut.
KTM 390 ADV : est-ce une vraie KTM ?

La petite KTM 390 ADV est en partie une moto indienne, car elle est fabriquée par un partenaire local. Mais beaucoup de constructeurs, dont BMW, délocalisent leur production pour faire baisser les coûts. KTM applique un cahier des charges européens très serrés, et la moto est pensée et développée en amont en Autriche.
Ce qui est appréciable sur cette petite KTM, c’est que sa petite cylindrée ne la condamne pas à des équipements médiocres pour en faire une moto « entrée de gamme ». La fourche WP entièrement réglable, les freins Bybre (du Brembo produit en Inde), un ABS sur l’angle, un traction control ou encore un TFT connecté. KTM n’a pas fait comme certains constructeurs, et vidé les vieux composants de ses étagères.
Mais puisqu’elle a tout d’une grande, le prix l’est aussi : 7 399 euros. L’acheter, ce n’est pas avoir envie d’économiser de l’agent, c’est préférer retourner à une puissance raisonnable.
D’ailleurs, s’il vous reste du budget, vous pourrez l’optionnel pour l’endurcir : crash-bars, sabot moteur en alu, guidon rehaussé et repose-pieds repositionnés pour mieux tenir debout.
Conclusion : la bonne idée pour débuter ?

La KTM 390 mérite son appellation ADV. C’est un peu l’aventure, sans se faire peur à haute vitesse et sans se prendre la tête. Sans forcer, vous vous retrouverez au bout du monde, ou pas loin.
Il y a de l’esprit trail des origines dans cette moto orange. Elle plaira aux débutants comme aux expérimentés qui en ont marre de conduire des avions de chasses trop compliqués.
J’ai aimé faire ce voyage avec elle plutôt qu’avec une grosse cylindrée. Parce qu’elle m’a soulagé en off-road et qu’elle m’a évité de bombarder sur route, de me mettre en danger plus que de raison et surtout de ne pas profiter des paysages autour de moi. Car le voyage, ce n’est pas juste rallier le point B, c’est aussi prendre le temps de découvrir et de savourer la route.
Son point fort, c’est sa polyvalence. Des rues saturées de Jo’burg aux sommets du Lesotho, elle a tout fait, sans jamais démériter ou se dire qu’elle n’était pas à sa place. En France, elle servira de moto utilitaire du quotidien et vous permettra de partir crapahuter dans les champs le weekend et de découvrir les joies du off-road.
En 2022, elle a corrigé certains défauts : le traction control ne se déconnecte plus à chaque fois que l’on cale (ce qui arrive souvent en off-road) et jantes à batons ont été renforcés. Mais il faudra optionner la petite KTM pour lui donner tous les atouts d’une baroudeuse, de quoi faire passer le prix au-dessus des 8 000 euros. Mais c’est presque un choix philosophique !
Et en face, la concurrence ?
Royal Enfield Himalyan

Une Indienne, née et élevée en Inde. Mais elle ne joue pas dans la même catégorie. 24,5 ch seulement et 200 kg sur la balance, l’Himalayan est plus calme dans son approche. Surtout le niveau d’équipements proposé n’est pas le même. Par contre, c’est (beaucoup) plus joli à regarder, c’est rustique à souhait et ça ne coûte “que” 5 390 euros. Vous pousserez la logique de décroissance jusqu’au bout !
Retrouvez l’essai de la Royal Enfield Himalayan sur les routes enneigées des Alpes !
Honda CRF300L

Beaucoup moins polyvalent, le petit trail Honda est résolument une moto de off-road. une Enduro qui se cache. Sauf que la CRF 300 L possède un moteur poussif et vite frustrant.
Pourtant, elle est quasiment impossible à faire caler et passera partout !
Sympa pour débuter en douceur le tout-terrain mais il faut prévoir une autre moto pour le reste des activités motardes.
Prix : à partir de 5 999 €
Honda CB500X

Le petit trail Honda est résolument plus routier. Mais c’est une petite voyageuse insoupçonnée. Le bicylindre de 44 ch est bourré de qualité et permettra de faire beaucoup, beaucoup plus que de la ville. La CBX acceptera de sortir des routes pavées pour se salir les roues. Mais j’ai un doute s’il fallait l’amener dans le Sani Pass, quoique, je me suis bien retrouvé au fin fond des Highlands !
Prix : à partir de 7 299 euros
Retrouvez l’essai de la Honda CB500X sur les routes des Écossaises !
J’ai aimé :
- Sa polyvalence
- Caractère du moteur
- Sa partie cycle incisive
J’ai moins aimé :
- La position debout
- La garde au sol limitée
- La manip’ pour déconnecter le traction control
Équipements de Julien (1,82 m – 80 kg)
- Casque : HJC C80
- Blouson : Spidi
- Chaussures : Forma Adventure
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