Il est difficile de vivre dans l’ombre d’une pop star. C’est pourtant le triste sort de la Kawasaki Z650, moto A2 la plus vendue derrière la MT-07. La Kawasaki est toutefois plébiscitée par les jeunes motards avec 2 759 exemplaires vendus et en grande majorité en version bridée. Mais sa concurrente, la Yamaha lui met une claque avec 6 019 motos vendues en 2021. Alors pourquoi cet écart ? La Z650 est-elle plus nulle que la MT-07 ?
En réalité, c’est un peu le vote pour le garçon ou la fille la plus populaire du lycée. Il y a le bon élève sympa et il y a le trublion qui fait des conneries. Dans son ADN, la Z650 a une philosophie clairement définie par Kawasaki : le premier gros cube d’un jeune motard. Une moto pensée pour les débutants et ça se ressent dès que l’on monte dessus. Mais qu’est-ce qu’une moto pour débutant ?
Kawasaki Z650, l’ami des petits et des grands

Bienvenue sur la Z650, une moto qui tombe tout de suite dans les mains. Ça se dit non ? Le petit guidon en forme de cintre n’est pas très large, il n’écarte pas trop les bras, privilégiant une position naturelle plutôt qu’une allure agressive. On se retrouve assis avec un dos droit, pas trop sur l’avant. La moto est très fine entre les jambes, le réservoir sculpté permet de bien le tenir et surtout on pose les pieds parfaitement au sol quelque soit votre taille. Une vraie moto pour les petits !
Ok, mais les grands ? Avec mon mètre 82 je n’ai pas vraiment souffert. Juste les jambes un peu trop repliées à mon goût et l’impression d’être un géant dessus.« On a une selle haute à 820 mm » me dit-on au retour chez Kawa, soucieux que je ne vienne pas rebuter les grands dans mon papier. Je me renseigne auprès des collègues qui en ont bénéficié et il semble qu’elle permette de se sentir plus à l’aise, et d’avoir une position plus sur l’avant.
En roulant, la position naturelle se confirmera, notamment avec de bons appuis sur les repose-pieds et aucune douleur au dos ou dans les bras.
La Z650, c’est no stress !

La Z650 est une bonne moto pour se mettre en confiance juste après la moto-école. Elle permettra de continuer à prendre ses marques à 2-roues et de travailler ses bases : évolution à basse vitesse, position du corps, coordination des gestes. Une journée à rouler sans que personne finisse agacé.
C’est bien beau de dire ça Julien, mais pourquoi concrètement ? Excellente question !
Non je ne deviens pas fou à me parler tout seul, rassurez-vous.
La Kawasaki est une moto avec un comportement sain. Elle est très naturelle à conduire, il n’y a pas à réfléchir à la technique exacte pour prendre un virage, on le prend. La moto fait le reste. La trajectoire peut même se rattraper en cas d’excès d’optimisme, gentiment toujours.
Dans le virage la moto est stable, ça ne bouge pas dans tous les sens grâce à des suspensions qui travaillent bien, ça ne rebondit pas ou ne se tortille pas entre l’avant et l’arrière. On est serein et on sort du virage en confiance en remettant du gaz.
Enchainement de virages suivant. Les changements d’angle se font sans forcer, la moto est légère et réactive. On finit vite par s’amuser sans avoir beaucoup de technique.
Bien équilibrée au niveau du poids, elle est aussi très maniable à petite vitesse. Elle est parfaitement à l’aise en ville pour slalomer entre les voitures. Avec 188 kg, c’est une plume qui ne risque pas de vous déstabiliser.
Pour ceux qui manquent encore de coordination embrayage, accélérateur, point de patinage, Kawasaki vous a mis un embrayage assisté et anti-drible avec le système « assist and slipper ». Derrière ce charabia technico-marketing, se cache un embrayage très souple qui vous aidera à trouver le point de patinage sans problème. Il sera donc difficile de caler au moment de vous lancer, ça évitera de rajouter de la maladresse et de se sentir un peu con.
Le moteur, l’art de l’équilibre selon Kawasaki

Le bicylindre parallèle est hérité de l’ER-6 et a été affiné au fil des ans. Pas le plus sexy sur le papier, Kawasaki a fini par en faire un moteur qui répond présent dans toutes les situations. Sans réel défaut mais sans être un cador, il n’est jamais frustrant. À mon avis, il se rapproche plus de la Honda CB 500 F, que de la MT-07. Mais là où Honda continue à courir derrière le caractère moteur, Kawa a trouvé le truc. Bien joué les petits hommes (et femmes) vert(e)s !
D’abord, ce moteur est devenu beaucoup plus doux à bas régime avec le temps. Étonnamment, il ne cogne pas à l’approche des 2000 tr/min, et ne vient donc pas rajouter du stress pour une évolution à basse vitesse, comme en ville où c’est déjà suffisamment compliqué comme environnement. Je dis étonnamment, car cette version est même plus souple que le même moteur présent dans le Versys 650 de 2019, que je roule habituellement. Une histoire d’assemblage à l’usine, me dit-on chez Kawasaki.
Comme la CB 500 F, ce moteur possède un caractère plutôt linéaire. Même en faisant le bourrin, il est toujours possible de doser comme il faut l’accélération sans se faire peur. La boite de vitesse est légère et précise, ce qui permet d’enchainer les rapports sans y penser.
Le bicylindre est toujours disponible avec de la reprise même en 6e sur l’autoroute pour relancer et dépasser, dans la limite des limites autorisées… ou au-dessus. Par contre, j’ai trouvé que la moto vibrait beaucoup à mi-régime, entre 4 500 et 5 500 tr/min. Pas la « good vibration » qui rend la moto vivante, mais la vibration du téléphone portable, désagréable. Je l’ai ressenti dans les pieds et surtout au niveau des fesses. Du coup, il m’a fallu soit rouler pépère, soit accélérer fort pour ne pas les sentir. Devinez ce que j’ai préféré faire ? Ralentir bien sûr !
La Z650, un peu trop facile pour être sympa ?

C’est là où on l’attend au tournant. Sans mauvais jeu de mots, c’est sur le caractère moteur que la comparaison se porte avec la MT-07 et c’est dommage car c’est un raccourci.
Déjà le moteur Kawasaki ne manque pas de « punch », il est volontaire dans les accélérations, il aime être poussé au-dessus des 3 000 tr/min. Au feu rouge, passez la première à fond de gaz et la roue se lèvera légèrement. En jouant avec les transferts de masse, vous pourrez même faire un wheeling. Et non, je n’ai pas de photos de moi sur la roue arrière, comme par hasard !
La Z650 offre plein de sensations mécaniques, elle communique, on ne s’ennuie pas à son guidon malgré sa facilité. Le moteur va grogner, l’échappement va en rajouter une couche et l’ambiance sonore va vous donner envie de mettre du gaz pour entendre la boite à air se remplir. La Z650 monte avec entrain dans les régimes moteurs. Le bridage, ne finit par intervenir qu’à l’approche des 8 000 tr/min, mais vous aurez déjà fait tout ce qu’il y a à faire bien avant.
Kawasaki, fier de son identité sportive, a donc pris soin de donner à cette moto juste ce qu’il faut de sportivité pour s’amuser. Et le châssis suit bien pour ça. Il va accepter de se faire maltraiter, le petit gabarit de la moto vous poussera peu à peu à sortir le coude, puis le genou, et pourquoi pas à vous rapprocher du bitume pour frotter un slider.
Il y a malgré tout une fourche avant un peu molle à l’avant. Ça donne beaucoup de mouvement avec un effet de bascule au freinage. Il faudra apprendre à la mettre en compression en freinant pour entrer bien stable en virage. C’est vraiment dommage quand on voit, par exemple, qu’Honda a réglé le problème avec une fourche inversée Showa sur la CB 500 F, ce qui rend son train avant bien plus rigoureux.
It’s not easy to be green

Les motos neuves sont de plus en plus chères, c’est un fait. Mais il y a un plaisir certain à en acheter une qui sort de sa boite. Cette Kawasaki ne se moque pas trop du consommateur en proposant un produit de qualité. Tout est bien assemblé, rien ne dépasse et la moto fait solide en main.
Il y a bien quelques stickers déco, mais le logo Kawasaki est verni. Le cadre du châssis vert donne un vrai style, tout comme les jantes. Même moi qui suis amateur de sobriété, je reconnais que ça fonctionne. Et puis, il parait qu’aimer le vert est un signe d’intelligence.
Je ne me suis toujours pas fait au « Sugomi », cette signature esthétique, mais n’empêche quand vous arrivez dans les rétros des voitures, elles s’écartent un peu plus volontiers en vous prenant pour une Z900 enragée.
Une moto connectée

Avec la Z650, Kawasaki n’a pas vraiment fait de grosses évolutions depuis longtemps. Façon Suzuki SV650 ou presque. Dernier changement en date, l’apparition d’une planche de bord TFT connectée. Un vrai plus, car on n’en trouve pas partout dans cette gamme de prix.
Très jolie, parfaitement lisible, les petits malins comme moi s’amuseront à faire clignoter l’écran quand le régime moteur approche de la zone rouge pour vous inviter à passer le rapport suivant. Par contre, il n’y a pas de commodo au guidon pour le régler et entrer dans le menu, c’est dommage, les boutons sont sous l’écran donc on ne peut pas les manipuler en roulant.
En revanche, l’utilisation de l’application Rideology de Kawasaki est très facile. Elle permet d’avoir des infos sur la moto, le calendrier de maintenance, retrouver une trace GPS de sa balade, afficher sur la planche de bord les appels et les messages. Un véritable journal de bord à partager sur les réseaux avec les copains. Bref, vous n’allez plus vraiment descendre de la moto et en soirée, on sait déjà de que vos conversations seront limitées.
Enfin, il n’y a pas de voice control pour coupler avec son intercom. Dommage, les vingtenaires adorent les intercom.
La polyvalence, une autre philosophie que la MT-07

Je voulais vous raconter une anecdote. Je croise une MT-07 à un feu rouge. Je décide de l’ignorer, mais lui décide de faire l’inverse. Il s’amuse à accélérer fort au feu vert en me saluant, poliment. Puis il a ralenti 100 m plus loin, pour revenir juste devant moi et me sortir un wheeling, afin de me montrer que c’était un gros kéké. Tiens, je me dis « t’as de la chance on est en ville, sinon je te fais disparaitre en deux virages ». Car si la MT-07 est plus flamboyante côté moteur, sa répartition du poids sur l’arrière la rend le train avant léger, trop léger. Et comme pour tourner il faut 2-roues, c’est vite un problème en virage d’avoir un train avant flou qui travaille mal.
La Z650 est plus homogène, plus sage certes, mais du coup plus performante grâce à un châssis plus neutre. Les apprentis pilotes y trouveront leur compte et pourront aller se faire plaisir pour une journée piste avec leur machine, afin de se faire les dents et les genoux.
La Z650 est donc plus polyvalente que la MT-07, moins sympa, mais peut-être aussi moins agaçante à la longue. Mais bon, je ne veux pas pousser les antagonismes entre les camps. Disons, que si la MT-07 est la cible, ce n’est pas la vraie concurrente à laquelle il faut comparer la Z650. Ce qui m’a surtout agacé, c’est que je me suis senti vieux sur ma moto alors que je n’ai que 35 ans. Comme disait Roger Murtaugh : “I am too old for this s**t !”.
La concurrence

- En frontal avec la MT-07 parce que le prix est le même (7 399 euros) et que c’est la numéro 1.
- Elle propose les mêmes arguments que la Honda CB 500F : une moto facile et accessible. Mais la Honda est moins chère à 6 499 euros et désormais mieux équipée.
- La Triumph Trident 660 est la seule à lui opposer un écran TFT et connecté (À partir de 7 995 euros) et ravira ceux qui cherchent une allure plus sobre.
Je n’ai pas évoqué
- Le duo. La selle semble presque confortable. Disons que c’est bien pour dépanner 20 minutes pour un trajet en ville. Mais il n’y a pas de poignées. Moto d’égoïste !
- Réservoir de 15 litres et consommation autour des 5 L/100 km (selon votre style de conduite), ce qui devrait vous laisser 300 km d’autonomie.
- Protection : c’est un roadster, donc c’est fait pour en prendre plein la figure.
- L’ABS n’est pas trop intrusif, même si à l’arrière il panique quand on sollicite trop le frein.
- Pas d’électronique embarquée, pas d’anti-patinage. Il faudra apprendre à être doux sur route mouillée. Mais avec 47,5 ch, ça devrait bien se passer !
- Suspensions non réglables, ce qui ne vous gênera qu’au bout des deux ans de A2 quand vous l’aurez bien saigné cette Z650.
- Je ne suis pas fan de ces pneus en première monte. Les Dunlop se défendent bien sur le sec, mais sont longs à chauffer et refroidissent vite. La marque en propose des meilleurs.
Conclusion

Ce n’est pas mon style de moto, pourtant je me rends compte que je lui ai fait pas mal de compliments.
Moins flamboyante que la MT-07, la Z650 est une moto qui fait bien les choses, sans réel gros défaut pour une moto de cette catégorie. Voilà une moto sympa, qui sera gentille avec les débutants un peu maladroits qui sortent du permis.
En 2022, Kawasaki ne s’est pas lancé dans un grand lifting pour venir titiller Yamaha, seuls les coloris changent. Pourtant une fourche inversée aurait pu affirmer sa différence face à la MT-07. Peut-être Akashi reconnait sa défaite, ou peut-être concentrent ils leurs forces ailleurs, sur les nouveaux moteurs électriques, hybrides ou encore hydrogène qui vont débarquer cette année.
La Z650 s’adresse à un public jeune et il faut reconnaitre que pour un trentenaire un peu embourgeoisé comme moi, le style ne colle pas vraiment.
C’est là qu’intervient la version RS de la Z650. La même, mais version néo-rétro. Ce qui devrait permettre de ne plus avoir à discuter avec les MT-07 au feu rouge, mais plutôt avec les hipsters en Ducati Scrambler. Je vous en parle dans le prochain essai et vous verrez qu’une position de conduite peut vraiment changer une moto.
Dites-moi en commentaire si vous avez des questions auxquels je n’ai pas répondu sur cette moto !
J’ai aimé :
- Sa facilité
- Le moteur sympa
- Moto vivante et joueuse
- TFT connecté
J’ai moins aimé :
- Toujours pas fan du Sugomi mais c’est un avis personnel
- Les vibrations à mi-régime
- La fourche trop molle qui plonge au freinage
Équipements de Julien (1,82 m – 80 kg)
- Casque : HJC F70
- Blouson : Spidi Metromover
- Gants : Vanucci VAG1
- Chaussures : Vanucci VTS 2
Ayant eu une Z650 2017 puis une Versys 2021 j’ai bien constaté comme vous que le moteur de la Z était plus souple plus rond donc plus agréable que celui de la Versys, et c’est difficile à justifier…
J’ai passé mon permis sur une z, c’est une bonne machine, facile (je conduisais une 125 depuis 2 ans). Par contre je n’aimais pas le moteur qui cognait beaucoup trop (et trop tôt) à bas régime.
Vous ne parlez pas des modèles un peu moins à la mode (à la mode de qui ?) qui pourtant sont un vrai plaisir à conduire. Pour ma part j’ai opté pour une Suzuki SV 650 2021. Tu n’as pas les nouveautés techniques des derniers modèles mais elle est très agréable à conduire, je pense une bonne base pour un permis A2. On va à l’essentiel.
Oui le moteur de la SV est top mais le châssis moins vif, la moto plus pataude, et le prix augmente alors que rien n’évolue vraiment dessus. Effectivement il faudra que je prévois un essai pour le site bientôt
Il faut l’adopter avant de s’amuser effectivement… mais vtwin + phare rond (mon 1er critère) et la dernière moto de série avec un cadre tubulaire… vite ton prochain test !
Ayant eu le permis en juin dernier, c’est la première moto.
J’en suis pleinement satisfait à part concernant les vibrations évoquées. C’est compliqué de bien voir dans les rétroviseurs dans ces moments là.